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Ferme des Quatre-Temps - Québec - Canada - Fr

Photo du rédacteur: AlterculteursAlterculteurs

Dernière mise à jour : 27 août 2020


C’est une ferme très spéciale car c’est une ferme école dont l’objectif est de former des futurs maraîchers et de faire la démonstration du modèle de l’agriculture bio-intensive qu’enseigne Jean-Martin Fortier, auteur du livre « Le Jardinier Maraîcher » expliquant ce modèle.

La méthode d’agriculture bio-intensive telle que pratiquée à la ferme des Quatre-Temps a été inventée et systématisée par Jean-Martin suite à la mise en place réussie de sa propre ferme Les Jardins de La Grelinette et son expérimentation pendant plus de quinze années. Bien sûr celle-ci est s’inspire de sources diverses et variées provenant de son expérience personnelle mais également, pour n’en citer que deux, d’autres maraîchers tels que les jardiniers maraîchers parisiens du XIXe siècle ainsi que Eliot Coleman, un maraîcher américain qui a repris ces méthodes du XIXe siècle et les a adaptées et développées dans notre époque contemporaine.

Nota : La ferme des Quatre-Temps est une marque qui regroupe deux sites, la Ferme des Quatre-Temps à Hemmingford où nous avons aidé et la ferme de Port-au-Persil, plus petite mais avec le même objectif.

Avec ses deux fermes, la production de la Ferme des Quatre-Temps est très complète. Nous avons pu goûté les excellents produits animaux et végétaux de la ferme mais nous ne présenterons ici que la production de légumes car nous n’avons pas expérimenté les autres aspects. Il faut tout de même noter qu’à Hemmingford, il y a donc un élevage de vaches à viande, de cochons ainsi que des poulaillers mobiles pour les œufs, on y trouve également des ruches ainsi qu’une cuisine professionnelle pour la transformation de produits.



La production maraîchère

Il y a environ 3,23 hectares (8 acres) de culture maraîchère.

Toutes les planches font 30m de long environ (100 pieds) et sont organisées en blocs puis en deux principaux jardins, sud et nord. Il y a également des serres qui sont chauffées en hiver et au début du printemps pour maintenir la température hors gel, situées dans le bloc sud principalement ainsi que plusieurs tunnels « froids » (non chauffés). Certaines planches sont également couvertes avec des serres-fraises, tunnels froids installés rapidement, assez haut encore pour entrer dedans (hoop house).

Un dernier bloc complète ces 8 acres, c’est le jardin d’hiver, de presqu’un hectare environ. Celui-ci est dédié aux cultures de conservations / cultures plus longues ou qui prennent plus d’espaces / qui peuvent être cultivées plus tard dans la saison (sachant que l’hiver au Québec arrive rapidement et s’installe durablement jusqu’au printemps avec beaucoup de neige).



La méthode de culture

Celle-ci est décrite en détail dans le livre « Le Jardinier Maraîcher » de JM Fortier. Nous ne décrivons que ce qui nous a parut particulier ou marquant (ou ce que nous en avons retenu finalement).

L’uniformisation des planches, qui sont permanentes, est un des aspects majeurs de cette méthode et permet d’utiliser la planche comme une mesure de production mais également de temps de travail et de créer un planning quotidien mais également annuel de façon beaucoup plus aisées.

Les rotations sont organisées en blocs de légumes regroupés pour leur temps d’arrivée à maturité ainsi que leur besoin en fertilisation. Bien sûr les familles botaniques sont également un critère mais au vue de la diversité des légumes, de la proximité des blocs ainsi que de leur rotation rapide, celui-ci n’est pas un critère « fixé dans la pierre » si des priorisations doivent être faites.

La salle de traitement post-récolte est un endroit super bien organisé et équipé qui permet de ne pas perdre de temps avec le lavage et la préparation pour le transport vers le marché tout en permettant d’obtenir un bon résultat et en travaillant protégé des intempéries, que ce soit le soleil ou le mauvais temps. Elle est équipée de grandes tables grillagées, de profonds et larges lavabos, est entièrement lavable à grande eau, et possède également un grand « bubbler » pour laver les feuilles. La salle est vraiment grande mais permet d’imaginer une version plus petite sur une ferme à petite échelle.

La préparation des planches se fait à l’aide d’un BCS, un motoculteur adapté de façon à pousser ou trainer des outils agricoles ainsi qu’avec la grelinette. Avec un peu de pratique, utiliser la grelinette devient un exercice physique mais confortable qui permet carrément de se maintenir en forme ! La fertilisation est adaptée à la culture qui va suivre et suit une recette composée de granulés de fumier de poules, de farine de sang de volaille et de roches écrasées.

La stratégie de désherbage outre des outils à mains classiques tels que des houes ou moins classiques tels que des étrilles manuelles ou des houes sur roues pour les allées, utilise beaucoup de grandes bâches noires afin de couvrir les planches inutilisées et/ou en préparation.

Un planning de culture permet de suivre l’état des planches actuel ainsi que de vérifier la planification et le retro-planning des semis réel et prévu.

La pépinière attenante à la salle de lavage et au stockage des légumes est également impressionnante, le grand espace est super optimisé de façon à pouvoir déposer un maximum de plateaux de semis sur des tables roulantes. La ventilation est aussi très présente. Attenant à cet espace, il y a également des tables disposés dans un espace semi-extérieur afin d’ endurcir les plants avant leur transplantation. Dans la pépinière des tables escamotables sont utilisés pour réaliser les semis manuels ou à l’aide d’un semoir « à vide » qui permet d’accélérer les semis. De grands bacs sur roue sous ces tables permettent de contenir le terreau déjà mixé selon les besoins et permet de récupérer les excédents de terreau lors de la préparation des plateaux qui peut ainsi se faire très efficacement.



La gestion d’équipe et l’organisation

L’ensemble de la méthode est beaucoup une question de bon sens et de rigueur afin de systématiser les tâches à réaliser et d’optimiser l’espace dans lequel elles se réalisent. C’est notre opinion toutefois que sans la super gestion d’équipe et l’organisation de la distribution des tâches qui sont mises en place à la ferme, cette méthode ne serait pas aussi efficace.

L’équipe est constituée d’environ une dizaine + d’employés-apprentis. Il y a les première-année et les deuxième-année, en fonction de leur niveau d’expérience ainsi que leur situation sur leur parcours d’apprentissage, ils reçoivent à l’automne ou au début de la saison suivante, leurs responsabilités principales. Une personne pour les récoltes, une personne pour les restaurants, une pour la préparation des marchés, une pour le désherbage, une pour la pépinière, une pour les semis directs, une pour les transplants, une pour la maintenance des outils,…etc. Ces responsabilités permettent à chacun sous sa perspective de définir les tâches à accomplir selon les objectifs à atteindre ainsi qu’un calendrier de culture établi collectivement à l’automne pour la saison suivante. Cette distribution est nécessaire car l’équipe et la ferme sont grandes. Sur une petite ferme toutefois, la distinction de ces différents domaines nous paraient également intéressantes afin de ne pas oublier des tâches à réaliser et ainsi observer la liste des choses à faire sous plusieurs perspectives qui se complètent.

Le calendrier de culture établi à partir des objectifs de vente est donc réalisé collectivement à l’automne. Nous avons pu observer le résultat mais pas le procédé car nous étions présents durant l’été. Il s’agit d’un exercice « classique » en maraîchage qui est aussi enseigné dans les cursus de maraîchage en France. A partir des objectifs de vente, sont déterminés les légumes à produire et leur quantité via le rendement. Les blocs de culture sont ensuite déterminés selon les priorités de rotation et les dates d’arrivées à maturité. A partir de la connaissance de leur période de croissance, sont ainsi déterminés les dates de semis et même parfois les dates d’intervention pour préparer les planches afin de s’assurer que les intervalles entre deux cultures laissent le temps à une bonne préparation (exemple prévoir plus de temps avant des carottes pour des faux semis). La clé réside ensuite dans le suivi entre le prévu et le réel afin de continuellement collecter des données permettant d’améliorer le planning d’années en années et de savoir à tout moment, la situation réelle face à la situation prévue.

Dans la pratique quotidienne, une réunion hebdomadaire du lundi est organisé au milieu de la journée entre les différents responsables afin d’établir la liste des tâches de la semaine. Nous n’avons pas assisté à cette réunion mais le résultat était bien visible sur le tableau des tâches de la semaine, séparé en domaine de responsabilité ainsi que mentionné ci-dessus. Chaque jour, il y a chaque matin une réunion qui dure entre 10min et 15min afin de distribuer les tâches de la journée et organiser l’équipe. Chaque responsable de « domaine » présente ce qu’il y a à faire et demande un nombre de personnes et attribue ensuite les tâches. JM Fortier est présent mais n’intervient que pour donner des conseils, rectifier le tir si certaines priorités ont besoin d’être mises plus en avant et en général pour guider quand c’est nécessaire. Son style de management de l’équipe permet aux membres de l’équipe de se sentir responsables et engagés mais aussi soutenus lorsqu’il s’agit de prendre des décisions critiques. C’était très agréable et impressionnant comme expérience. Ayant eu l’expérience d’un programme spécial en management dans la grosse entreprise industrielle dans laquelle je bossais avant, sensé être le top de ce qui se fait en management et ayant ensuite vécu le management dans cette même entreprise (radicalement différent de la théorie enseignée), je me dis que ces managers auraient beaucoup à apprendre à regarder comment cette ferme tourne car voir en réalité ce qu’est une bonne gestion d’équipe est très rare.



La commercialisation

Les produits maraîchers de la ferme sont en vente le weekend sur le grand marché central de Montréal, à 45min de la ferme. Il y a également un autre petit marché le jeudi et des livraisons pour près d’une vingtaine de restaurants sur Montréal. Quelques paniers sont aussi préparés pour les partenaires de la ferme. Le chiffre d’affaire d’un marché du weekend est au-dessus des 10 000 dollars. La mise en vente se fait quasiment jusqu’à la fin de l’année et reprend très rapidement en début d’année (contrairement à la ferme de Port-au-Persil plus au nord du Québec qui s’arrête rapidement au milieu de l’automne et ne reprend qu’en avril), il est donc vital d’allonger la saison grâce aux cultures sous serre et aux cultures de conservation.

En termes financiers, l’installation de cette ferme-école a été financée par un millionnaire qui souhaite soutenir le développement de l’agriculture biologique au Québec. Toutefois, l’objectif à présent est bien d’en faire une ferme rentable donc il y a une réelle attention à la qualité et aux rendements ainsi qu’à l’efficacité des dépenses sur la ferme. Il est parfois nécessaire de se rappeler que cette ferme forme des maraîchers pour travailler sur des fermes plus petites que celle-ci tout en appliquant les méthodes de cette ferme donc les investissements nécessaires pour démarrer sont à ramener à cette petite échelle et non à comparer avec ceux qui ont été nécessaires pour la ferme-école .

Depuis que cette ferme a vu le jour, déjà plus de 9 petites fermes maraîchères ont été créées par les élèves de l’école avec d’autant plus de maraîchers que certaines ont été créées en association. Une réussite visible de l’apprentissage pratiqué à la ferme .



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